Homélie pour le 2 novembre

Une conviction fondamentale a traversé tous les siècles de la chrétienté : c’est que l’amour peut parvenir jusqu’à l’au-delà, et rendre possible un mutuel donner et recevoir dans lequel nous demeurons unis les uns aux autres par des liens d’affection au-delà des limites de la mort. Cela explique pourquoi hier, avec amour, nous avons honoré tous les saints, et pourquoi aujourd’hui, ave amour, nous prions pour tous les défunts. L’amour qui nous unit et qui est Dieu lui-même a vaincu la mort et il tisse entre nous des liens où nous pouvons continuer de nous manifester les plus profonds sentiments de nos cœurs : de la bonté, du réconfort, de la gratitude, ou encore de la demande de pardon. Depuis que Jésus a vaincu la mort, elle n’est plus un obstacle à la communion profonde de tous les vivants, qu’ils soient dans la gloire du Royaume, dans l’épreuve de la vie présente, ou dans l’heureuse souffrance du purgatoire. L’amour est partout présent, partout en travail, allumant partout son feu dévorant. En lui, les saints exultent, les défunts espèrent, les pèlerins marchent, et tous se tiennent par le cœur et par la main.
Aujourd’hui, tandis que nous prions pour nos frères et sœurs défunts, Jésus vient à notre rencontre. Il n’est pas seul. Comme il était accompagné autrefois par ses disciples sur les routes de Galilée, il est accompagné par son Eglise du ciel, l’Eglise de tous les saints. Et le voici qui croise son Eglise d’ici-bas en marche avec toute l’humanité. Que d’hommes, que de femmes, vivants ou morts, sont portés par sa prière ! Le cœur de l’Eglise est assez grand pour ne laisser mourir personne sans l’accompagner jusqu’à ce grand moment et au-delà encore. Elle pleure avec tous ceux qui pleurent. Et pour tous, elle espère car son Seigneur est mort et ressuscité pour tous, et il veut que tous soient sauvés.
En voyant son Eglise bien-aimée d’ici-bas, Jésus est saisi de pitié et lui dit : « Ne pleure pas. » Elle lui montre tous ses enfants morts, souvent hélas dans des conditions pénibles, voire dramatiques. Elle lui rappelle jusqu’où il s’est approché avec son Corps et son Sang pour toucher toute l’humanité et elle le prie avec une grande foi de toucher encore aujourd’hui la grande civière de ses enfants morts. Il s’approche d’elle, il lui obéit. Les porteurs s’arrêtent, ces porteurs que nous sommes avec notre prière. Jésus est là tout proche, et nous l’entendons dire à nos défunts : Levez-vous, redressez-vous, suivez-moi !
Saisis de crainte et d’amour, rendons gloire à Dieu ! Ceux qui mettent leur confiance en lui comprennent qu’il est le Chemin, la Vérité et la Vie, non seulement pour nous ici-bas mais aussi pour les défunts. Nous croyons que Dieu est plus grand que notre cœur et qu’il connaît toutes choses. Et nous nous écrions : un grand Prophète s’est levé parmi nous, et c’est plus qu’un Prophète ! C’est la Résurrection et la Vie !

Frère Olivier, abbé de Cîteaux


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